Ce cœur qui haïssait la guerre...

Robert Desnos - L'Honneur des poètes - 1943





Plan de la fiche sur Ce cœur qui haïssait la guerre de Robert Desnos :
Biographie de Robert Desnos
Introduction
Texte du poème
Annonce des axes
Commentaire littéraire
Conclusion


Biographie de Robert Desnos

    Né en 1900 à Paris, mort en Tchécoslovaquie en 1945.
   Poète français. Mouvement intellectuel et esthétique. Mouvement dadaïsme de dada) > surréalisme. Comme Paul Eluard, s'en est écarté à cause de désaccords politiques avec André Breton. S'engage dans le journalisme, continue à écrire poèmes. Recueil célèbre : Corps et biens, 1930 > inspiration spontanée > écriture automatique. Participation à émissions radio de 1930 à 1939. Actualité, menaces sur l'Europe. Engagement dans activité domestique, journalistique. Mobilisé, démobilisé. Travail dans journal "Aujourd'hui" après Vel'd'Hiv'. > s'engage dans la résistance.
Recueils : Chantefable, Etats de veille. Arrêté par la Gestapo. Déporté en Tchécoslovaquie en février 44. Meurt du typhus après l'arrivée des alliés à Terezin. Pendant la période de 39 à 45 > poèmes regroupés dans Destinée arbitraire > publication posthume > inspiration engagée.

Robert Desnos
Robert Desnos


Introduction

    Ce cœur qui haïssait la guerre est un poème de 1943 en vers libres qui se présente comme un constat entre les opinions pacifistes de Desnos et la réalité de l'engagement armé. Robert Desnos se montre en faveur de la résistance, et invite à la révolte contre l'Allemagne et ceux qui la servent, afin de retrouver la liberté perdue.
    Le texte est construit sur une double opposition : passé > présent, attitude de refus de guerre > engagement personnel , appel collectif. Ce poème est construit comme une démonstration argumentée.


Texte du poème

Ce cœur qui haïssait la guerre

Ce cœur qui haïssait la guerre
voilà qu'il bat pour le combat et la bataille !
Ce cœur qui ne battait qu'au rythme des marées, à celui des saisons,
à celui des heures du jour et de la nuit,
Voilà qu'il se gonfle et qu'il envoie dans les veines
un sang brûlant de salpêtre et de haine.
Et qu'il mène un tel bruit dans la cervelle que les oreilles en sifflent
Et qu'il n'est pas possible que ce bruit ne se répande pas dans la ville et la campagne
Comme le son d'une cloche appelant à l'émeute et au combat.
Écoutez, je l'entends qui me revient renvoyé par les échos.

Mais non, c'est le bruit d'autres cœurs, de millions d'autres cœurs
battant comme le mien à travers la France.
Ils battent au même rythme pour la même besogne tous ces cœurs,
Leur bruit est celui de la mer à l'assaut des falaises
Et tout ce sang porte dans des millions de cervelles un même mot d'ordre :
Révolte contre Hitler et mort à ses partisans !
Pourtant ce cœur haïssait la guerre et battait au rythme des saisons,
Mais un seul mot : Liberté a suffi à réveiller les vieilles colères
Et des millions de Francais se préparent dans l'ombre
à la besogne que l'aube proche leur imposera.
Car ces cœurs qui haïssaient la guerre battaient pour la liberté
au rythme même des saisons et des marées,
du jour et de la nuit.

Robert Desnos - L'Honneur des poètes - 1943




Annonce des axes

I. Une démonstration argumentée
1. Les connecteurs logiques
2. Le lexique
3. Les temps verbaux
4. Un poème pour convaincre

II. Le constat d'une situation présente
1. La découverte
2. L'engagement
3. De l'engagement personnel au groupe, à la collectivité

III. La résolution du dilemme
1. L'importance de la liberté
2. Un combat pour la vie



Commentaire littéraire

I. Une démonstration argumentée

1. Les connecteurs logiques

Présence de nombreux connecteurs logiques (articulation), surtout dans la seconde moitié du poème et dans les débuts de phrases :
"Mais non" vers 11 > dénégation. "Pourtant" vers 17 > objection. "Mais" vers 18 > objection. "Et" vers 19 > adjonction, valeur consécutive. "Car" vers 21 > explication. > > Démonstration qui procède par étapes successives. Compréhension s'éclaire avec le système lexical du texte. Jeux des temps.


2. Le lexique

Affirmation de son refus de faire la guerre > reprise du verbe "haïr" (vers 1, 17, 21). Idée confirmée par exemple "battre". Tournure restrictive vers 3 > sens particulier de la relation avec la vie : bat avec manifestations de la nature ("au rythme des marées, à celui des saisons") => vie.
Rapprochement entre battre et combattre : attire l'attention sur évolution de la situation. Mise en relief par jeux des temps et termes exprimant le constat.
Allitération en [ba] ("qu'il bat pour le combat et la bataille !") qui mime le batttement d'un cœur.


3. Les temps verbaux

Temps verbaux visibles par le même verbe. Ex : verbe "battre", à l'imparfait, au présent.
- Présent : ensemble des constats au présent : "voilà qu'il se gonfle". Tous ces verbes font référence à la guerre et au combat > engagement.
- Imparfait : sens différent : vers 3, 17, 21 ; au sens de ponctuer la vie. S'intègre à ensemble des termes en rapport avec la nature, la paix, la vie. > > Met en relief deux situations antagonistes : participation au combat / Refus de la guerre ; difficilement conciliables. Le cœur est la métonymie de la situation du poète. Affirmation de l'idéologie pacifiste > réalité de l'engagement. Texte pose une problématique : conciliation de deux éléments antagonistes > > > trouver une justification.


4. Un poème pour convaincre

Le poème comporte de nombreuses marques d’oralité, comme des adresses au lecteur, des points d’exclamation => apparence d’une plaidoirie orale, d'un discours à un public qu'il faudrait convaincre.


II. Le constat d'une situation présente

Présent : affirmation : expression de la découverte.

1. La découverte

Plusieurs éléments dans le texte :
- Tonalité exclamative au premier vers
- Emploi récurrent de "voilà que" (vers 2, 5)
- Succession de constats : "et que" ; anaphore mise en relief.
- "écoutez" vers 10, "l'", "son de cloche" : comparaison avec cœur.
-> invitation à partager la perception du poète.
- Marque étape.
- Souligne passage progressif du constat à l'appel.


2. L'engagement

Réalité : participation à la guerre. Affirmation dans champs lexicaux du combat : "combat", "bataille" vers 1, "émeute" vers 9, "révolte", "mort", vers 16. > notions de guerre, relayées par d'autres termes de manière connotée : "salpêtre" vers 6, métaphore vers 14 "mer à l'assaut des falaises".
* engagement dans sa réalité
* poète veut entraîner tout un groupe : ce cœur > ces cœurs.


3. De l'engagement personnel au groupe, à la collectivité

Volonté exprimée : ce cœur > ces cœurs > millions d'autres cœurs. > > Amplification, multiplication présentée étape par étape comme le résultat de l'engagement personnel répercuté de manière sonore.
Champ lexical du bruit très présent : battement de cœur, siffle, son de cloche, écho, appel, mot d'ordre... > évoque poétiquement le passage. Progression par la disposition des phrases. Succession de "que" > scande la montée de la révolte. Aboutissement : "millions de Français" vers 21.
Engagement en contradiction avec déclaration initiale > paradoxe reposant sur deux attitudes autour du combat. Poète essaie de justifier ce paradoxe > résolution contradictoire.


III. La résolution du dilemme

Vers 17 "Pourtant" : objection. Phrase relance l'opposition exprimée dans les premières lignes du poème. vers 18 : éléments de la résolution du paradoxe.

1. L'importance de la liberté

Elan vers action justifié par la recherche de liberté. Mot mis en relief par "un seul mot", par majuscules. > mot rassembleur détermine le comportement.
Associé à "vieilles colères" > minimise l'engagement collectif pour insister sur la complicité entre les gens. Côté familial, accent sur fraternité.
"Besogne" > euphémisme. Ramène engagement à travail, tâche qu'il faut accomplir pour la sauvegarde du groupe, au nom de la liberté.


2. Un combat pour la vie

Evocation rythme des saisons, des marées... Battements de cœurs associés au rythme de la vie naturelle. En se battant pour la liberté, se battent pour vie en général. Liberté préservera rythmes naturels, fondamentaux. Fin du poème apporte clé du dilemme, dépassé et expliqué. Pluriel : poète rassembleur, porte-parole, justifie le combat.





Conclusion

    Dans Ce cœur qui haïssait la guerre, Desnos appel à la résistance. Le poème témoigne un engagement d'hommes dont la vocation n'est pas la guerre. Il témoigne le déchirement intérieur du poète partagé entre deux attitudes, de leurs résolutions. C'est un exposé argumenté et poétique.
    L'argumentation repose sur défense des valeurs fondamentales : vie / liberté. Pour Desnos, le combat pour la liberté surpasse l'idéologie pacifiste.

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